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Protection du territoire et des activités agricoles

La protection du territoire et des activités agricoles désigne l’ensemble des actions, lois et règlements visant à assurer la pérennité de l'agriculture :

  • en évitant la perte de terres arables, notamment dans le cas de l’urbanisation;

  • en luttant contre la fragilisation du territoire et des activités agricoles, notamment due à une cohabitation avec des activités non compatibles;

  • en valorisant la production agricole durable et locale.

Source : Vivre en Ville

Le rôle du territoire agricole

Comme le reste de l’Amérique du Nord, le Québec s’est initialement développé grâce à l’agriculture. Le développement subséquent des échanges alimentaires au sein d’un système alimentaire globalisé n’a pas entraîné, malgré des conditions climatiques rigoureuses, la cessation des activités agricoles locales. En 2011, l’industrie bioalimentaire a généré 22 milliards de dollars, soit 7,3 % du produit intérieur brut du Québec (Québec. ISQ et MAPAQ, 2013).

Bien que sa principale fonction, la production agricole, constitue une activité économique majeure, le territoire agricole joue un rôle bien plus vaste dans la société. Outre la valeur sociale de la production alimentaire, les autres contributions de cet espace, notamment quant au façonnement des paysages, à la création d’une identité collective ou à la gestion de l’eau, dépassent largement sa seule valeur économique.

Si le Québec est une terre de grands espaces, le territoire agricole constitue une ressource limitée, pour ne pas dire rare : à peine 2 % du territoire du Québec sont propices à l’agriculture (Ouimet, 2009). Qui plus est, il s’agit d’une ressource non renouvelable, dans le sens où sa régénération après artificialisation prend plusieurs siècles. Sa protection relève dès lors de l’urgence (ONU. FAO, 2024).

Un territoire et des activités agricoles sous pression 

Des terres agricoles menacées par le développement immobilier | Source : Vivre en Ville

La concurrence des activités urbaines 

Au milieu des années 1960 et 1970, les rapports La Haye et Castonguay mettaient en évidence l’impact de l'étalement urbain sur la disparition des terres agricoles québécoises (Sylvestre, dans Poirier, 2010). Encore aujourd’hui, la faible valeur foncière du territoire agricole par rapport au milieu urbanisé suscite la convoitise des promoteurs et des investisseurs, d’autant plus qu’habitations, commerces, industries et bureaux bénéficient d’une rentabilité au mètre carré très supérieure aux activités agricoles.

Dans un large périmètre autour des agglomérations, le territoire agricole (comme les milieux naturels) tend ainsi à constituer une réserve pour l’urbanisation future. Dans l’attente d’un dézonage qui y autorisera la construction, il fait alors l’objet d’une spéculation, qui fait grimper artificiellement la valeur foncière du territoire, et donc les taxes. Pour les exploitants, les pressions pour vendre à d’autres fins que l’agriculture deviennent doubles : la valeur de leur terre dépasse largement sa rentabilité agricole, et les taxes qui augmentent au rythme de la valeur foncière deviennent insupportables.

Une perception négative de l'agriculture 

La cohabitation des activités agricoles et résidentielles concourt à une perception négative de l’agriculture. Les nuisances générées par les méthodes de production industrielles (odeurs, bruit, pollution, etc.) renforcent l’idée qu’elle est incompatible avec les activités résidentielles. Cela a pour effet de contraindre davantage les activités agricoles qui se trouvent à proximité des habitations, y compris celles qui prennent place de plein droit dans la zone agricole.

Le contexte économique et le modèle d'agriculture 

Les activités agricoles s’avèrent d’une grande vulnérabilité dans le contexte de l’économie moderne et mondialisée. Entre 1951 et 1961, la population rurale et le nombre de travailleurs agricoles ont diminué de moitié au Québec (Dupont, 2009, dans Poirier, 2010); aujourd’hui, la main-d’œuvre est rare et chère et la relève peine à s’établir.

Les exploitants relèvent aussi les défis de la financiarisation des récoltes, qui rendent les exploitants agricoles vulnérables aux fluctuations des prix, de la concurrence internationale et de la difficulté à rejoindre le marché. Les grands distributeurs posent des exigences de volume, de régularité, de traçabilité ou de qualité qu’une large part des exploitants n’est pas capable d’atteindre.

Protéger les activités agricoles en protégeant le territoire 

La loi sur la protection du territoire et des activités agricoles 

Vue d'ensemble de la zone agricole définie par la loi | Source : Commission de protection du territoire agricole du Québec

La Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA) du Québec a été mise en place en 1978, afin de limiter les effets de la périurbanisation et de protéger les milieux agricoles. En 2013, 63 500 km2 étaient sous sa protection, soit près de 4 % du territoire québécois, dont la moitié est considérée propice à l’agriculture (Québec. CPTAQ, 2013; Ouimet, 2009). À l’intérieur de son périmètre, seuls les usages agricoles sont autorisés.

Une protection non permanente

La zone agricole permanente n’est pas tout à fait permanente, mais soumise à un processus administratif, légal et parfois négocié auprès de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ). Celle-ci a notamment pour mandat de s’assurer que les modifications de zonage demandées n’imposent pas de contraintes supplémentaires à l’agriculture. Ainsi, chaque année, la zone agricole fait l’objet de demandes d’inclusion et d’exclusion, dont le bilan peut paraître positif à première vue, mais qui démontre clairement que la pression est forte sur les terres les plus fertiles du Québec.

En effet, sur papier, la zone agricole est relativement stable depuis 1988 en raison des exclusions (24 651 hectares) et des inclusions (28 235 hectares), mais comme l’a fait remarquer l’Union des producteurs agricoles (UPA), cette analyse fait abstraction des milliers d’hectares qui ont été sacrifiés pour des utilisations non agricoles (UNA) en zone verte (p. ex. drainages de terrains municipaux, servitudes de passage, infrastructures énergétiques, etc.) (UPA, 2023).

Depuis le début des années 1990, les inclusions se sont surtout faites dans les régions éloignées (Côte-Nord, Saguenay–Lac-Saint-Jean et l’Abitibi-Témiscamingue), où les sols et le climat sont moins propices à l’agriculture, et les exclusions se sont surtout faites autour des grandes agglomérations et dans les terres de la vallée du Saint-Laurent (région de la Capitale-Nationale, Mauricie, Chaudière-Appalaches, Laurentides, Montérégie et Centre-du-Québec) (Québec. CPTAQ, 2014).

S’il est vrai que le territoire agricole est demeuré relativement stable au fil du temps, la disponibilité des terres de bonne qualité propices à la culture ainsi que la quantité de terres cultivées ont significativement diminué, affaiblissant du même coup la capacité nourricière du Québec. 

Un outil imparfait, mais néanmoins utile

Les critiques sont nombreuses et fréquentes quant à l’efficacité réelle de la LPTAA. Toute imparfaite qu’elle soit, et insuffisante pour répondre à l’ensemble des enjeux agricoles, la loi reste tout de même relativement efficace pour contenir la pression foncière.

Dans un souci d’amélioration, cette loi a été amendée à de nombreuses reprises au fil des ans, malgré le fait qu’elle n’ait jamais fait l’objet d’une réforme en profondeur depuis son adoption. Le rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois incluait plusieurs recommandations qui bénéficieraient de nouvelles modifications législatives (Québec. CAAAQ, 2008).

D'autres outils 

La ceinture verte du Golden Horseshoe, autour de Toronto | Source : Friends of the Greenbelt Foundation

La ceinture verte

Plus connue pour sa protection des milieux naturels, la ceinture verte contribue aussi à la protection des terres agricoles. Dans la région d’Ottawa, cet outil permet de protéger 20 000 hectares d’espaces verts, dont des fermes, des forêts et des milieux humides. C’est aujourd’hui la plus grande ceinture verte de propriété publique au monde. Par ailleurs, 55 % de la production ontarienne de fruits vient de la ceinture verte de la grande région de Toronto (Golden Horseshoe Greenbelt), où se trouvent 800 000 hectares de terres agricoles (FGF, 2014). 

Les fiducies foncières et les servitudes

Des initiatives québécoises émergent également pour protéger la vocation agricole de certains terrains, avec la mise en place de fiducies foncières ou de servitudes. C’est notamment le cas de Protec-Terre et de la fiducie agricole UPA-Fondaction, qui protègent des terres et des fermes contre la spéculation foncière.

La protection du territoire par sa valorisation 

La protection du territoire agricole répond à l’urgence de la situation québécoise, mais elle ne saurait résoudre le problème à la source et durablement. « La meilleure façon de protéger le territoire agricole est encore de l’occuper et de le mettre en valeur » (Ouimet, 2009). Pour cela, chaque MRC peut élaborer un plan de développement de la zone agricole (PDZA). Complémentaire des autres documents de planification, cette démarche vise à identifier les moyens d’exploiter pleinement le potentiel agricole du territoire. À l’échelle locale, l’élaboration en cours des plans de développement des communautés nourricières (PDCN) met en place des conditions pour des projets structurants en agriculture et alimentation de proximité, notamment à travers la mise en valeur de terres agricoles municipales.

La multifonctionnalité du territoire agricole 

Une diversité de paysages et des interfaces claires | Source : Vivre en VIlle

Miser sur la multifonctionnalité du territoire et des activités agricoles permet de mettre l’accent sur leur valeur ajoutée, et de dépasser la perception négative que peut en avoir la population. À travers leurs fonctions sociales et culturelles, paysagères, environnementales et autres, ce territoire et ces activités peuvent en effet, en plus des fonctions économiques qui leur sont traditionnellement attribuées, contribuer à la qualité de vie de la population, l’attractivité des territoires, la régulation du climat, la protection de la biodiversité, etc. Pour lutter contre l’abandon des activités agricoles, la MRC des Basques a ainsi impliqué des producteurs pour remettre en culture les friches longeant les routes principales et embellir le paysage (Québec. MAPAQ, s.d.).

Le renforcement de la vocation agricole et nourricière du territoire 

Optimiser l’urbanisation

Préserver le territoire agricole à long terme suppose de mettre un point final à l’agrandissement des périmètres d’urbanisation. En valorisant mieux les secteurs déjà urbanisés et en y concentrant la croissance, la ville se reconstruit sur elle-même plutôt qu’au détriment du territoire productif.

Valoriser le potentiel productif du territoire

L’assise foncière agricole une fois assurée, un nouvel équilibre peut voir le jour entre la ville et l’agriculture. Plutôt qu'un front en progression, le rapport ville / agriculture est appelé à devenir un continuum spatial, qui associe à chaque milieu urbain un type d’activité agricole. En plein cœur de la ville se développe l’agriculture urbaine, dans le périurbain, la production maraîchère, horticole ou encore l’agrotourisme, alors qu'une agriculture plus traditionnelle se poursuit dans les milieux ruraux.

La création de systèmes alimentaires de proximité 

La relocalisation de la production et de la distribution des produits dans une logique de proximité permet d’ancrer l’agriculture et l’alimentation sur le territoire. Cet ancrage apporte des avantages multiples aux citadins, tant sur le plan de l’approvisionnement que du sentiment d’appartenance. Il constitue le premier pas vers un système alimentaire durable, où la sécurité alimentaire de la population, la prospérité des acteurs impliqués et la santé des écosystèmes sont assurées.

Références

AGGLOMÉRATION DE LONGUEUIL (2014). PDZA – Plan de développement de la zone agricole de l’agglomération de Longueuil. [En ligne] 122 p.
FGF [FRIENDS OF THE GREENBELT FOUNDATION] (2014). Agriculture by the Numbers: Understanding the Greenbelt’s Unique Advantages. Toronto : Friends of the Greenbelt Foundation. [PDF] 84 p.
ONU. FAO [ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L’ALIMENTATION ET L’AGRICULTURE] (2024). Soil is a non-renewable resource. Rome : Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. [En ligne] (consulté le 5 février 2024).
OUIMET, Bernard (2009). Protection du territoire agricole et développement régional : une nouvelle dynamique mobilisatrice pour nos communautés, Rapport remis au ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. [PDF] 36 p.
POIRIER, Luc (2010). De l’histoire et de la politique agricole au Québec à l’émergence d’une agriculture soutenable. Montréal : Groupe de recherche en intérêt public – Université du Québec à Montréal (GRIP-UQAM). 66 p.
QUÉBEC. CPTAQ [COMMISSION DE PROTECTION DU TERRITOIRE AGRICOLE] (2014). Rapport annuel de gestion, 2013-2014, Québec : Gouvernement du Québec. 74 p.
QUÉBEC. CPTAQ [COMMISSION DE PROTECTION DU TERRITOIRE AGRICOLE] (2013). Le zonage agricole a 35 ans. Québec : Gouvernement du Québec. [En ligne]
QUÉBEC. CAAAQ [COMMISSION SUR L’AVENIR DE L’AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE QUÉBECOIS] (2008). Agriculture et agroalimentaire : assurer et bâtir l’avenir – Propositions pour une agriculture durable et en santé. Rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois. Québec : Gouvernement du Québec. [PDF] 274 p.
QUÉBEC. ISQ [INSTITUT DE LA STATISTIQUE] et MAPAQ [MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE, DES PÊCHERIES ET DE L’ALIMENTATION] (2013). Profil sectoriel de l’industrie bioalimentaire du Québec, édition 2012. Québec : Gouvernement du Québec. [PDF] 131 p.
QUÉBEC. MAPAQ [MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE, DES PÊCHERIES ET DE L’ALIMENTATION] (s.d.). La multifonctionnalité de l’agriculture – Projet La route des couleurs : mise en valeur des paysages et préservation du patrimoine agricole des Basques. Gouvernement du Québec. 2 p.
QUÉBEC. MDDELCC [MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DE LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES] (2014). Guide de référence du Règlement sur les exploitations agricoles (L.R.Q., c. Q-2, r. 26). Québec : Gouvernement du Québec. 188 p.

Sources complémentaires 

UPA [UNION DES PRODUCTEURS AGRICOLES] (2023). La zone agricole perd 12 terrains de football par jour depuis 25 ans, Longueuil, Union des producteurs agricoles. [En ligne] (consulté le 6 février 2024).
QUÉBEC. CPTAQ [COMMISSION DE PROTECTION DU TERRITOIRE AGRICOLE] (2001). Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles : Modifications législatives du 21 juin 2001. Québec : Gouvernement du Québec. [PDF] 21 p.
QUÉBEC (2015). Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles : RLRQ, chapitre P-41.1, à jour le 1er février 2015, Québec : Gouvernement du Québec. [En ligne]
VIVRE EN VILLE (2014). Villes nourricières : mettre l’alimentation au cœur des collectivités. [+info] 141 p. (coll. Outiller le Québec) 

Galerie photos 

Notice bibliographique recommandée :

VIVRE EN VILLE (2015). Protection du territoire et des activités agricoles. Carrefour.vivreenville.org

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