À la suite de la fermeture des usines Matra en 2003, la Ville de Romorantin-Lanthenay a décidé de requalifier les six hectares de friches en un quartier résidentiel. Étant donné sa proximité avec la rivière Sauldre, la Ville a opté pour l'aménagement d’un quartier résilient face aux inondations, intégrant la construction d’un parc public servant de bassin de rétention.
Détails sur le projet
Statut
Complété en 2016
Porteur du projet
Ville de Romorantin-Lanthenay
Type de quartier adapté
Construction d’un quartier neuf
Type de bâtiment adapté
Adaptation d’un bâtiment existantConstruction d’un bâtiment neuf
Type d’espace commun résilient
Parc ou place publiqueRue
Milieu d’intervention
Urbain
Contexte lié aux inondations
Le quartier Matra est situé à proximité immédiate du centre-ville de Romorantin-Lanthenay, en France, où résident plus de 18000 personnes. Le quartier, situé dans un méandre de la rivière Sauldre, est soumis à une probabilité élevée d’inondation, ayant été affecté par six crues majeures depuis 1910, ce qui contraint son développement. Au début des années 2000, le Plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) de la Sauldre classe le site en secteur d’aléa moyen. Cela implique une réglementation de la constructibilité du site pour réduire la vulnérabilité du quartier face aux crues.
Description du projet
Le site industriel Matra, autrefois spécialisé dans la draperie puis dans la construction automobile, a connu une importante reconversion urbaine à partir de 2006. La Ville a transformé six hectares de friches industrielles en un nouveau quartier résidentiel, ce qui a nécessité d'importants travaux de décontamination et de désartificialisation des sols. Dès le début du projet de requalification, la priorité a été donnée à la résilience urbaine face aux inondations, conformément aux directives du Plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) de la Sauldre de 2004. L’objectif était de garantir le libre écoulement de la rivière en crue en aménageant le site comme un affluent temporaire de la rivière. Au démarrage du projet, la Ville a commandé une étude du secteur afin de mieux connaître ses caractéristiques hydrauliques et les intégrer dans l’aménagement du quartier. Ainsi, le quartier a été conçu en tenant compte de la topographie du terrain, du sens d'écoulement et des hauteurs d’eau prévues. Au total, 80% de l’ancien site ont été transformés en parc public, tandis que les 20% restants ont été utilisés pour le développement urbain (habitations et voirie).
Le quartier a été réaménagé pour favoriser la mixité sociale, avec la construction d'un ensemble de 150 logements, dont une partie de logements sociaux et abordables et d’une résidence pour les personnes aînées. La valorisation de la nature en ville, notamment la création d’espaces publics, était également au cœur du projet urbain.
Concrètement, les immeubles d’habitations ont été érigés sur des pilotis à plus de 1,5 mètre de hauteur, avec la majorité des rez-de-chaussée occupés par des stationnements ouverts. L’emprise au sol des bâtiments est limitée à 20% de la surface de la parcelle, respectant ainsi le principe de transparence hydraulique (c’est-à-dire ne pas entraver l’écoulement de l’eau) si les véhicules sont retirés à temps avant la crue. Les bâtiments adoptent une forme courbe et évoquent celle d’un bateau lavoir (bateau relié aux berges par un ponton, historiquement utilisé par les blanchisseuses pour laver le linge), intégrant ainsi la présence de l’eau dans leur design. Les parcours piétonniers, dont le tracé épouse celui du cours d’eau, ont été construits au-dessus du niveau maximal d’inondation pour permettre l’accessibilité piétonnière même en cas d’inondation. Les trottoirs ont ainsi été élevés à 1,5 mètre, soit 30 centimètres au-dessus des plus hautes eaux connues (PHEC), par mesure de précaution. Les édifices conservés, notamment l’ancienne usine de draperie Normant, inscrite au titre des Monuments historiques, ont été consolidés grâce à des fondations épaisses en pierre dure. La Ville a également souhaité promouvoir une «culture du risque» en sensibilisant sur les aléas naturels, notamment à travers le jardin de Sologne, un parc public qui sert de bassin de rétention en offrant un nouveau lit à la Sauldre en cas d’inondation.
L’exemple de ce quartier montre comment la construction en zone inondable peut être guidée par la résilience, intégrée aux échelles urbanistique, architecturale et paysagère. Plutôt que d’adopter une stratégie de résistance contre les inondations, qui font partie intégrante du quartier, l’objectif est de favoriser un aménagement en adéquation avec les dynamiques naturelles de la rivière.
Retombées
Le quartier Matra a démontré sa résilience lors de la crue millénale de 2016 qui a occasionné des dommages matériels mineurs, par rapport à d’autres quartiers de la ville, submergés sous 1,5 mètre d’eau pendant une semaine. Les niveaux habitables des bâtiments n’ont quasiment pas été inondés et la décrue s’est produite dans les 48 heures ayant suivi l’inondation grâce à l’aménagement urbain facilitant l’écoulement de l’eau. Les trottoirs sont restés émergés.
En 2015, le projet s’est vu décerner le Grand Prix d’Aménagement «Comment mieux bâtir en terrains inondables constructibles?».
Autres informations
Partenaires du projet
Maîtrise d’ouvrage : Immobilière 3F Centre-Val de Loire, Aegide Nexity
Maîtrise d’oeuvre : Bureau d’architecture Éric Daniel-Lacombe, Bernard Lassus Paysagiste
Coûts et financement
La Ville de Romorantin-Lanthenay, propriétaire foncier, a vendu les parcelles de l’ancien site industriel à un promoteur privé (Aegide Nexity) et à un bailleur social (Groupe 3F) pour la construction des logements. Le maire a assuré le leadership politique du projet, le présentant comme une opportunité de répondre aux besoins en habitation tout près du centre-ville et de redynamiser la ville en réhabilitant l’ancien site industriel. Ce soutien politique fort a permis à la Ville de bénéficier de nombreuses subventions publiques. Au total, la Ville a dû investir 13 millions d’euros (eq. 18,3 millions de dollars canadiens en 2016), dont 2,5 millions d’euros (eq. 3,5 millions de dollars canadiens en 2016) pour le parc public et trois millions d’euros pour la voirie (eq. 4,2 millions de dollars canadiens en 2016). La construction des édifices s’élève à 21,5 millions d’euros (eq. 30,2 millions de dollars canadiens en 2016).
Liens utiles
DANIEL-LACOMBE, Éric (s. d.). «Romorantin : vivre avec l’indiscipline des eaux», Revue EkologiK, n°52, p. 40-45. [PDF]
Références
CENTRE EUROPÉEN DE PRÉVENTION DU RISQUE D’INONDATION [CEPRI] (2017). La réalisation d’opérations d’aménagement résilientes aux inondations : qui gagne quoi ? [PDF]. 72 p.
DANIEL-LACOMBE, Éric (s. d). «Romorantin : vivre avec l’indiscipline des eaux». EkologiK, n°52, p. 40-45. [PDF]
LENOUVEL, Julie (2020). «L’urbanisme résilient, nouveau paradigme de la fabrique de la ville face au risque d’inondation ? L’exemple du quartier Matra à Romorantin-Lanthenay», Urbanités. [https://www.revue-urbanites.fr/chroniques-lenouvel/] (consulté le 20 mai 2024).
RODE, Sylvain, Mathilde GRALEPOIS et Éric DANIEL-LACOMBE (2018). «Les transactions entre la ville et l'inondation pour un urbanisme plus résilient» La Houille Blanche. vol. 104, n°3, p. 34-40. [DOI : 10.1051/lhb/2018030].
Le quartier Matra est situé à proximité immédiate du centre-ville de Romorantin-Lanthenay, en France, où résident plus de 18 000 personnes. Le quartier, situé dans un méandre de la rivière Sauldre, est soumis à une probabilité élevée d’inondation, ayant été affecté par six crues majeures depuis 1910, ce qui contraint son développement. Au début des années 2000, le Plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) de la Sauldre classe le site en secteur d’aléa moyen. Cela implique une réglementation de la constructibilité du site pour réduire la vulnérabilité du quartier face aux crues.